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virginie despentes

  • Qui sont les vrais insoumis ?...

    Dans cette émission du Plus d’Éléments, diffusée par TV Libertés, l'équipe du magazine, autour d'Olivier François, à l’occasion de la sortie du nouveau numéro, s’intéresse aux nouvelles dissidences à partir d’un sondage exclusif consacré à "la désobéissance aujourd’hui" et d’un entretien avec Marine Le Pen. Quels sont les nouveaux visages de la dissidence ? Qui, parmi les Français, conteste ? Autant de questions auxquelles la rédaction répond.
    Au menu également : la mort du grand Sempé, et "Cher connard", le dernier roman de Virginie Despentes... On trouvera sur le plateau,
    François Bousquet, rédacteur en chef, Patrick Lusinchi, directeur artistique, Christophe A. Maxime et Daoud Boughezala...

     

                                                

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  • Madame Bobovary...

    Nous reproduisons ci-dessous la dernière Chronique d'une fin du monde sans importance, de Xavier Eman, publiée dans le numéro 149 de la revue Éléments, actuellement en kiosque...

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    Madame Bobovary

    Ravie, le visage épanoui et la moue excitée, Eliane sortit de la librairie en serrant amoureusement contre son sein, tel le bébé qu'elle n'avait jamais voulu, le précieux sac contenant la dizaine de livres qu'elle venait d'acheter. Elle avait en effet acquis l'intégralité de la « sélection rentrée littéraire » de son magazine préféré, « Maxi Actuel », la revue de la nouvelle féminité décomplexée. Elle pressait maintenant le pas, presque fiévreuse, impatiente de se jeter à corps et âme perdus dans ces passionnantes auto-fictions torturées et dépressives, débordantes de sexe, de drogue et de visions du monde délicieusement désabusées. Elle même était d'ailleurs fortement désabusée. Il est vrai que la vie ne lui avait pas fait de cadeaux. Après une scolarité brillante et ennuyeuse à Stanislas puis des études à Sciences Po, elle avait été, durant quelques mois, vaguement attachée de presse pour un groupe pharmaceutique avant d'épouser sans passion mais avec faste un prothésiste dentaire spécialisé dans la réfection buccale des stars du show-biz et de la télévision. Ainsi, elle avait été impitoyablement condamnée à une vie de dîner mondains, de promenades en Sologne et de vacances à Saint-Barthélémy ou Verbier, une vie doucereuse et routinière qui ne lui correspondait absolument pas. Son mari ne lui avait jamais proposé d'aller dans une boîte à partouzes et ne prenait même pas la peine de la tromper. Elle en souffrait beaucoup. Car elle était faite pour la douleur, les angoisses, les névroses et les expériences violentes que l'existence lui avait cruellement épargné. Fort heureusement, il lui restait la littérature contemporaine, chaque nouvel ouvrage étant pour elle une délicieuse injection de misère morale, d'échec familial, de haine conjugale, de perversion et de déréliction toxicologique... Elle sniffait dans ces lignes la cocaïne qui n'avait jamais inondé ses narines, discernait dans l'encre des caractères le sang ayant jailli des veines de ces auteurs génialement, et perpétuellement, suicidaires, se troublait en transformant le blanc des pages en coulées de foutre répandues par ces amants à la fois érotomanes et complexés sur leurs innombrables maîtresses qu'elle imaginait invariablement sous les traits de jeunes femmes étiques et blafardes, tenant en permanence une cigarette blonde entre leurs doigts aux ongles rongés... Grâce à cette littérature, elle pouvait se vautrer dans la boue tant aimée et tant espérée sans même quitter ses draps de soie. C'est pourquoi elle était si enthousiaste en s'échappant de chez son dealer, regagnant hâtivement l'appartement de l'avenue Wagram sans même apercevoir les clins d'oeil des vitrines Hermès ou Dior qui, d'ordinaire, transformaient chacune de ses sorties en pic bénéficiaire pour l'industrie du luxe.

    Marchant de plus en plus vite, elle imaginait déjà le subterfuge qu'elle utiliserait pour échapper au dîner prévu ce soir avec des collègues de son mari, des imbéciles parvenus et grossiers qui n'avaient jamais vibré aux envolées cosmétiques de Florian Zeller, aux affres incestueux de Christine Angot, pas plus qu'aux sodomies alternatives et révolutionnaires de Virgnie Despentes ou aux questionnements egotiques de Yann Moix... Un nouvel accès de forte migraine suffirait d'ailleurs certainement à assurer sa tranquillité pour la soirée. Eliane se mit même à ricaner en imaginant son gros mari venir s'enquérir de sa santé et lui porter une tisane apaisante avant de l'embrasser sur le front et de rejoindre ses invités. L'idée de ce baiser éteignit rapidement son ricanement qui céda la place à un léger frisson de dégoût, mais la vision du brushing Zellerien sur la couverture dépassant du sac l'apaisa immédiatement.

    La nuit était maintenant presque totalement tombée et Eliane ressemblait à toutes ces autres ombres trottinantes et déjà un peu effacées, impatientes de rejoindre famille et foyer. Pourtant Eliane savait qu'elle n'était pas comme elles, pas le moins du monde même, car ce n'était pas le confort et la sécurité bourgeoise qu'elle s'empressait de retrouver mais au contraire les désordres et tumultes intellectuello-germanopratins qui s'élèvent tellement au dessus de toutes ces petites vies laborieuses et vaines, à jamais mornes et bornées. Elle rayonnait maintenant de morgue et de mépris en frôlant ces misérables fourmis qui ignoraient tout des amours sado-cannibalesques du couple DSK/Iacub et préféraient le visionnage de divertissements télévisés à la description des prurits gynécologiques de publicitaires trentenaires à lunettes carrées. Ces gens qui encombraient la rue n'étaient rien pour elles, ce monde n'était pas définitivement pas le sien. Elle courrait presque maintenant pour retrouver ses douloureux amants et c'est presque dans un état de transe qu'elle traversa la rue sans prendre garde au bus qui surgissait au même moment et qui, malgré le hurlement d'un coup de frein, la percuta de plein fouet.

    Le corps inerte d'Eliane gisait maintenant au milieu de la chaussée, bientôt entouré de badauds horrifiés. A ses cotés, quelques livres ensanglantés et le visage souriant de Florian Zeller.

    Xavier Eman (Éléments n°149, octobre - décembre 2013)

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  • Les snipers de la semaine... (18)

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    Au sommaire :

    - sur Causeur, Ludovic Maubreuil mouche ceux qui instrumentalisent le sexe ;

    Le sexe : un bel instrument !

     

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    - sur Valeurs actuelles, Aymeric Chauprade exécute l'actuelle diplomatie française.

    La diplomatie française est-elle nulle ? Oui!

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  • Récupérés par le système ?...

    Le Goncourt pour Michel Houellebecq et le Renaudot pour Virginie Despentes... Le système a-t-il montré, encore une fois, sa capacité à vampiriser toutes les formes de subversion ou de critique ? Nous reproduisons ici le point de vue de la chroniqueuse Ursula Michel.

     

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    « Les femmes sont plus faciles à choquer », « la prostitution, je trouve ça très bien. Ce n'est pas si mal payé, comme métier... », « la religion la plus con, c'est quand même l'islam ». La provocation, Michel Houellebecq l’a usée par tous les trous lors de ses premières années de médiatisation intensive. Choquer, subvertir, tel était son credo, autant dans les interviews, là où le personnage Houellebecq s’est construit, que dans ses romans, loupe vilement déformante de la basse nature humaine. Mais après plus de quinze ans de bons et loyaux services à la littérature, la reconnaissance de ses pairs, par l’entremise des prix et autres trophées, n’était toujours pas au rendez-vous. Alors avec La Carte et le territoire, apparaît un nouvel homme Houellebecq. Affable, consensuel, pas un mot plus haut que l’autre, le dépressif le plus connu du paf s’assagit dans les médias.

    Suivant une courbe sensiblement différente (elle n’est pas encore la bonne cliente des médias mainstream), mais aboutissant finalement à la même intronisation par les élites, la punk Despentes, autrefois connue comme l’auteur de Baise-moi, calme elle aussi le jeu. Apocalypse bébé, prix Renaudot de la cuvée 2010, oublie l’agressivité mordante de ses débuts pour se tourner vers une prose plus lisse, une homosexualité encore revendiquée mais embourgeoisée et une image médiatique plus conforme aux canons de la communication. Et ça paie. Qui aurait parié il y a dix ans sur ces deux « loosers » magnifiques à l’expression dévastatrice? Qui pouvait alors envisager Houellebecq et Despentes comme les parangons de la littérature française, adoubés par une élite poussiéreuse en costume trois-pièces?

    En 2009, Marc-Edouard Nabe, nominé cette année au Renaudot mais recalé, rapportait dans Le Vingt-Septième livre ce conseil de Houellebecq : «Si tu veux avoir des lecteurs, mets-toi à leur niveau ! Fais de toi un personnage aussi plat, flou, médiocre, moche et honteux que lui. C'est le secret, Marc-Édouard. Toi, tu veux trop soulever le lecteur de terre, l'emporter dans les cieux de ton fol amour de la vie et des hommes !... Ça le complexe, ça l'humilie, et donc il te néglige, il te rejette, puis il finit par te mépriser et te haïr... »

    Conseil marketing que Nabe n’a guère suivi (d’où son ostracisation du microcosme littéraire parisien?) mais qui semble avoir porté ses fruits pour l’auteur d’Extension du domaine de la lutte et pour Despentes dans une moindre mesure (même si on l’a vu cette année en promo chez Ruquier ou Denisot). Renversement profond des codes de nomination des dignitaires du monde des Lettres ou vampirisation de la subversion par le système, force est de constater que l’année 2010 crée un précédent notable, du moins en apparence. Entre Makine (Un Testament français, 1995), Ruffin (Rouge Brésil 2001) ou Van Cauwelaert (Un Aller simple, 1994) pour Houellebecq et Picouly (L’Enfant léopard, 1999), Bouraoui (Mes Mauvaises pensées, 2005) ou Pennac (Chagrin d’école, 2007) pour Despentes, les choix des jurés font coexister des auteurs pour le moins hétérogènes. Mais avec Beigbeder l’année dernière (Renaudot), peut-être Franz-Olivier Giesbert (juré) et ses acolytes essaient-ils de rajeunir l’image du prix, quitte à récompenser tous azimuts, des ouvrages non méritants.

    Quant au Goncourt, trop souvent perçu comme un prix pour la grande Littérature, peut-être ont-ils voulu s’auréoler du (feu) parfum de scandale du trublion Houellebecq ? Dommage qu’il ait fallu attendre l’assagissement médiatique et littéraire des deux sales gosses Houellebecq et Despentes pour leur rendre hommage. Baise-moi et Plate-forme auraient bien mieux mérités d’entrer dans le panthéon que leur dernier rejeton.

    Ursula Michel (Darkplanneur, 9 novembre 2010)

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