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hervé juvin - Page 23

  • L'union européenne, une entreprise à décerveler les peuples ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Hervé Juvin à Vincent Tremolet de Villers pour Figarovox, à l'occasion de la parution de son essai Le Mur de l'Ouest n'est pas tombé aux éditions Pierre-Guillaume de Roux.

    Économiste de formation, Hervé Juvin a publié deux des essais particulièrement marquants ces dernières années, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013).

     

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    Hervé Juvin : «L'union européenne, une entreprise à décerveler les peuples»

    Votre livre s'intitule Le mur de l'ouest n'est pas tombé. Comment analysez-vous l'affaire Franceleaks?

    Ne nous faites pas rire! L'affaire des écoutes américaines des Présidents français, dont il est promis juré qu'elles se sont arrêtées en 2012, en dit plus sur l'état de la France que sur la réalité des écoutes. Partons du principe que tout le monde écoute tout le monde, suggérons avec le sourire que les Français ne sont pas les derniers à le faire, ajoutons que l'explosion de l'espionnage de données par les systèmes américains ne leur assure pas des triomphes stratégiques bien marquants, et regardons-nous!

    Les Français veulent croire que nous vivons dans un monde de bisounours. L'Europe est une entreprise à décerveler les peuples européens, ceux du moins qui croiraient que les mots de puissance, de force, d'intérêt national, ont encore un sens. C'est l'étonnement général qui devrait nous étonner; oui, l'intérêt national américain n'est pas l'intérêt français! Oui, entre prétendus alliés, tous les coups sont permis, et les entreprises françaises le savent bien! Oui, les Américains ne manquent pas de complices européens qu'ils savent diviser pour mieux régner! Oui encore, l'exceptionnalisme américain leur permet d'utiliser tous les moyens pour dominer, pour diriger ou pour vaincre, et la question n'est pas de protester, c'est de combattre!

    Édouard Snowden est en Russie et ces révélations servent objectivement les adversaires des États-Unis. N'est-ce pas tout simplement de la géopolitique?

    Le premier fait marquant de l'histoire Snowden, c'est que des pays qui se disent attachés à la liberté d'expression et indépendants n'ont pas souhaité l'accueillir, voire se sont alignés sur l'ordre américain visant à le déférer à la justice américaine. Il n'y a pas de quoi être fiers, quand on est Français, et qu'on a été l'un des champions des non-alignés! Nous sommes rentrés dans le rang ; triste résultat de deux présidences d'intérim, avant de retrouver un Président capable de dire «non!».

    Le second fait, c'est que Snowden a révélé un système de pouvoir réellement impérial, qui tend à assurer de fait un empire mondial américain. Nous sommes face au premier nationalisme global. Le point crucial est l'association manifeste d'une surpuissance militaire, d'une surpuissance d'entreprise, et d'un universalisme provincial - une province du monde se prend pour le monde et veut imposer partout son droit, ses normes, ses règles, ses principes, en recrutant partout des complices. Ajoutons que l'affaire des écoutes, celle de la livraison des frégates «Mistral», comme celle des sanctions contre la Russie, éclairent la subordination absolue de ceux que les États-Unis nomment alliés, alors qu'ils les traitent comme des pions ; est-ce la manifestation de la stratégie du «leading from behind» annoncée par Barack Obama dans un célèbre discours à West Point?

    Le troisième fait est au cœur de mon livre, Le Mur de l'Ouest n'est pas tombé. Les États-Unis attendent la guerre, ils ont besoin de la guerre extérieure qui seule, va les faire sortir de la crise sans fin où l'hyperfinance les a plongé. Seul, un conflit extérieur les fera sortir du conflit intérieur qui monte. D'où la rhétorique de la menace, du terrorisme, de la Nation en danger, qui manipule l'opinion intérieure et qui assure seule l'injustifiable pouvoir de l'hyperfinance sur une Amérique en voie de sous-développement.

    Quel est, selon vous, le jeu américain vis-à-vis de la Russie?

    La Russie est l'un des pôles de la résistance à l'ordre américain. Et c'est, à ce jour, la seule puissance militaire réellement capable de faire échec à une agression américaine. Cantonner, encercler, affaiblir la Russie, vient donc en tête de l'agenda effectif des États-Unis. Le général Wesley Clark l'a dit sans ambages ; «il faut en finir avec les États-Nations en Europe!» Voilà pourquoi, entre autres, l'idéologie américaine nous interdit toute mesure pour lutter contre l'invasion démographique qui nous menace, promeut un individualisme destructeur de nos démocraties et de notre République, veut nous contraindre à une ouverture accrue des frontières, notamment par le traité de libre-échange transatlantique, et nous interdit de réagir contre les atteintes à notre souveraineté que représente l'extraterritorialité montante de son droit des affaires.

    Les États-Unis réveillent le fantôme de la guerre froide pour couper le continent eurasiatique en deux. C'est le grand jeu géopolitique des puissances de la mer qui est reparti ; tout, contre l'union continentale eurasiatique! Bill Clinton a trahi les assurances données à Gorbatchev par George Bush ; l'Otan ne s'étendra jamais aux frontières de la Russie. Les États-Unis accroissent leur présence militaire dans l'est de l'Europe, dans ce qui s'apparente à une nouvelle occupation. Que font des tanks américains en Pologne et dans les pays baltes? Le jeu géopolitique est clair ; l'Eurasie unie serait la première puissance mondiale. Les États-Unis, on les comprend, n'en veulent pas. On comprend moins leurs complices européens. Et moins encore ceux qui répètent que la puissance, la force et les armes ne comptent pas!

    Poutine ne cède-t-il pas au défaut (autocratie, volonté expansionniste) que l'Occident lui prête?

    Critiquer la volonté impériale des États-Unis n'est pas encenser Monsieur Poutine! Quand je critique la confusion stratégique américaine, je n'écris rien que des élus américains, comme Elizabeth Warren, comme Rand Paul, comme Jeb Bush lui-même, qui vient de déclarer qu'il n'aurait jamais envahi l'Irak, ont déclaré!

    Je constate simplement que les États-Unis ont eu peur du rapprochement entre l'Union européenne et la Russie, qui aurait menacé le privilège exorbitant du dollar, et qu'ils se sont employés à la faire échouer, comme ils s'étaient employés à affaiblir l'euro. Je constate ensuite que le Président Poutine a tourné la page du communisme pour renouer avec la tradition des tsars ; il a un confesseur, il favorise l'orthodoxie et redonne prestige et autorité à la troisième Rome, il discute avec le Pape François, etc. tout ceci dans un contexte où les États-Unis utilisent les droits de l'individu, sans origine, sans sexe, sans race, sans quoi que ce soit qui le distingue, sauf l'argent, pour dissoudre les sociétés constituées et en finir avec la diversité des cultures et des civilisations, qui n'est rien si elle n'est pas collective. Je salue le fait que la Russie soit un pôle de résistance à l'individualisme absolu, comme l'Inde, comme la Chine, comme l'Islam à sa manière, et qu'elle garde le sens de la diplomatie, qui est celui de reconnaître des intérêts contraires, pas d'écraser ses opposants. La France ne l'est plus. On n'est pas obligé d'être d'accord avec eux sur leur manière singulière d'écrire l'histoire de leur civilisation, pour être d'accord sur le fait que leur singularité est légitime, puisqu'ils l'ont choisie, et mérite d'être préservée!

    La chute de la diversité des sociétés humaines est aussi, elle est plus grave encore que la chute de la biodiversité animale et végétale. Car c'est la survie de l'espèce humaine qui est en danger. Il n'y aura plus de civilisation, s'il n'y a pas des civilisations. Et la Russie orthodoxe, comme l'Islam chiite, comme l'hindutva de Narendra Modi, sont des incarnations de cette merveille ; la diversité des formes que l'homme donne à son destin.

    Les Russes savent aussi écouter leurs partenaires et leurs adversaires?

    Un peu d'histoire. L'invention, l'entraînement, le financement d'Al Qaeda, des talibans, a enfoncé une épine dans le pied de l'URSS, dont elle ne s'est pas relevée. Brzezinski l'a dit avec une rare franchise ; «Al Quaeda a produit des dégâts collatéraux ( side effeects) sans importance dans la lutte que nous avons gagnée contre l'URSS». Partout, y compris pour justifier l'intervention armée en Europe et pour défendre l'islamisation de l'Europe, les États-Unis derrière leur allié saoudien, se sont servis de l'Islam. Ils s'en servent en Inde, en Chine, ils s'en sont servis en Tchetchénie. Et ils se préparent à renouveler l'opération au sud de la Russie, en déstabilisant les États d'Asie centrale et l'extrême-est de la Chine.

    Parmi les preuves multiples, regardons la prise de Palmyre par l'État islamique. Admettons qu'un vent de sable ait effectivement empêché toute intervention aérienne pour la prise de Ramadi, quelques jours plus tôt. Mais Palmyre! Dans une zone désertique, sans grand relief, Palmyre qui ne peut être atteinte que par des pistes ou des routes droites sur des kilomètres, en terrain découvert ; une armée qui dispose de l'exclusivité aérienne, comme celle de la coalition, peut empêcher toute entrée ou sortie d'un seul véhicule de Palmyre! L'inaction de la coalition est inexplicable. La diplomatie française, sidérée par les néo-cons qui l'ont envahie, ne semble plus savoir lire une carte de géographie. Mais une France devenue pauvre en monde, livrée à la confusion des valeurs et des intérêts, une France qui n'incarne plus la résistance à l'intérêt mondial dominant qu'est l'intérêt national américain, qui sera peut-être demain l'intérêt chinois, est-elle encore la France?

    Hervé Juvin, propos recueillis par Vincent Tremolet de Villers (Figarovox, 26 juin 2015)

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  • « Reprenons notre destin en main ! »...

    Vous pouvez ci-dessous découvrir le remarquable entretien avec Hervé Juvin réalisé le 18 juin 2015 par Élise Blaise pour TV Libertés à l'occasion de la sortie du nouvel essai de cet auteur, Le Mur de l'Ouest n'est pas tombé (Pierre-Guillaume de Roux, 2015).

     

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  • Le Mur de l'Ouest n'est pas tombé !...

    Les éditions Pierre Guillaume de Roux publient cette semaine un essai d'Hervé Juvin intitulé Le Mur de l'Ouest n'est pas tombé. Économiste de formation, Hervé Juvin a élargi sa réflexion à l'histoire, à la géopolitique et à l'anthropologie, et a sans doute écrit deux des essais les plus importants publiés au cours des dix dernières années, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013)...

     

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    "Qu’est-ce que l’Europe aujourd’hui ? Sinon le moyen de l’intérêt national américain. Gouvernance, création de valeur actionnariale, compétitivité et attractivité des territoires… Quatre expressions d’une idéologie, celle de la primauté de l’économie comme moyen de la puissance. Sans oublier le copié-collé d’une « culture » d’importation américaine : toute puissance de la com’, adoption du mariage pour tous, bientôt peut-être de la procréation médicalement assistée, dogme de l’indifférenciation des sexes, tiré de la théorie du genre qui fit fureur aux Etats-Unis voici vingt ans ; dévaluation de l’appartenance nationale, et déchéance d’un projet national fédérateur et identifiant, etc.
    Faire Europe oui mais à condition de rompre avec l’erreur de l’occidentalisme qui la dresse contre ses voisins et alliés naturels, de la Russie aux pays du sud, ceux sans qui elle ne se fera pas l’Europe ne participera à une renaissance de la civilisation qu’en affirmant la séparation nécessaire entre les cultures et les Nations, qui garantit leur diversité. Le rêve totalitaire d’un gouvernement mondial est la promesse de l’esclavage, et la négation du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Pour en finir avec cette utopie qui a fait tant de mal, l’Europe doit réaffirmer l’importance politique de frontières internationalement reconnues, de la citoyenneté comme appartenance nationale exclusive de tout marché, et le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats."

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  • Le retour de l’État ?...

    Nous vous signalons la publication du treizième numéro de la revue Perspectives libres consacré au retour de l’État.

    La revue Perspectives libres, dirigée par Pierre-Yves Rougeyron, est publiée sous couvert du Cercle Aristote et est disponible sur le site de la revue

     

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    Au sommaire :

    Éditorial

    Le retour de l’État par Pierre-Yves Rougeyron

    Dossier : Le retour de l’État

    Les métamorphoses de l’État par Hervé Juvin

    Le retour de l’État par Wolfgang Drechsler

    Pour une métapolitique de l’État par Romain Lasserre

    L’État de Grâce par Jérémy-Marie Pichon

    La naissance du nouveau monde par Miguel Guenaire

    L'espace et l’État par Jacques Blamont

    Pour une nouvelle planification par Alain Cotta

    L’État-nation : toujours au poste par Alasdair Roberts

    Étatisme et socialisme par Julien Funnard

    L’État-Tiers par Jean-François Gautier

    Libres pensées

    « L'autre canon » : histoire de la science économique à la Renaissance par Erik S. Reinert

    Management : une époque « formidable » ?... par Philippe Arondel

    Libres propos

    « Ready for Hillary » : vers un Dernier Moment Américain ? par Clément N'Guyen

    La criminalité chinoise organisée par Horacio Calderon

    Espagne-Europe : une relation paradoxale par Miguel Ayuso

    Camus philosophe : l'enfant et la mort par Pierre Le Vigan

    L'économie selon Houellebecq par Pierre Le Vigan

     

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  • Antiracisme : une juste cause dévoyée à des fins politiciennes ?...

    Nous reproduisons ici une remarquable tribune d'Hervé Juvin, publiée par le Figaro et reproduite par La plume à gratter, dans laquelle il dénonce l'instrumentalisation de l'antiracisme par le gouvernement et ses effets destructeurs...

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    Antiracisme : une juste cause dévoyée à des fins politiciennes

    Et une loi sur la répression des propos racistes de plus. Qui peut être contre ? Après l’émotion suscitée par les crimes de janvier, dont l’un des objets manifestes est de terroriser ceux qui résistent à l’islamisation de la France, beaucoup peuvent pourtant s’interroger : est-ce la bonne réponse ?

    Les Français constatent chaque jour que les flux migratoires sont une réalité d’importance dont il devrait être licite de débattre. Or ils se souviennent qu’on ne leur a jamais demandé leur avis et que le changement d’origine de la population française, l’une des transformations majeures de la France au cours des trente dernières années, a été subi, tenu en lisière du débat démocratique, que ses effets n’ont jamais été évalués, et qu’il n’a jamais fait l’objet d’un vote ou d’une loi ; c’est un décret qui a autorisé le regroupement familial ! Ils posent de plus en plus ouvertement la question. Voilà pourquoi la loi s’efforce d’entretenir cette mystification qui est au cœur d’un discours bien rôdé depuis la récupération de la « Marche des Beurs » par SOS Racisme et la culpabilisation des Français, poursuivie par le rapport Tuot (Conseil d’État, 2014) : tout se passe bien, d’ailleurs il ne se passe rien, il est interdit de dire qu’il y a des problèmes. Tout se passe bien, et si ça se passe mal, c’est de votre faute !

    Le déni du réel dans lequel s’enfonce la France commence par la censure des mots. Sera-t-il possible de dire d’un Noir qu’il est noir, d’un Blanc qu’il est blanc, et qu’une soucoupe est une soucoupe ? L’idéologie de l’individu absolu répond que non. L’individu hors sol, que ne détermine rien, ni son origine, ni son âge, ni son sexe, ni sa foi, voilà l’idéal. Substituer l’individu abstrait, fiction juridique, aux hommes d’ici, des leurs et d’une histoire, voilà l’objet. Désintégrer ces liens, ces appartenances, ces communautés qui font de l’individu une personne, qui lui donnent une identité, voilà l’urgence !

    Nous sommes au cœur de la Grande Séparation moderne. La séparation de naguère passait dans l’espace, dans la langue et dans les mœurs, entre des sociétés humaines auxquelles elle assurait la liberté de se conduire, de choisir leur destin et d’approfondir cette diversité splendide des mœurs, des cultures et des croyances qui constitue la civilisation humaine, qui n’est pas si elle n’est pas plurielle ; « il n’y a pas de civilisation s’il n’y a pas des civilisations » (Claude Lévi-Strauss). La séparation moderne met fin à cette diversité des sociétés humaines et coupe l’individu de toutes les déterminations par lesquelles l’histoire, la nation, la culture ou la religion faisaient de lui le membre d’une communauté, l’acteur d’une société et un citoyen responsable. Comme l’analyse depuis longtemps Marcel Gauchet, il n’y a que des individus qui ont des droits, et rien d’autre ne peut les singulariser ; voilà l’idéologie moderne, voilà ce qui réalise la grande séparation d’avec l’histoire comme avec la nature, voilà comment le droit entreprend d’en finir avec les nations, de dissoudre les peuples, et d’étouffer la démocratie au nom de l’Homme nouveau.

    Le paradoxe est double. D’abord, l’antiracisme, au nom de l’égalité et du droit à la différence, est porteur d’une indifférenciation destructrices des cultures et des identités, à la fin de la diversité des sociétés humaines. Il promeut ce qu’il veut combattre : l’avènement d’un modèle occidentaliste qui entend faire du monde une grande Amérique au nom de l’universel. Est-ce le destin de tout Malien, de tout Malgache, de tout Algérien de devenir un Français comme les autres ? C’est que l’antiracisme confond inégalité et différence. Il affirme que la nature fait des hommes tous les mêmes, sans percevoir que ce naturalisme est la négation du travail patient, millénaire, des cultures pour se distinguer, se singulariser et se transmettre. A cet égard, les formes dévoyées de l’antiracisme constituent un anti-humanisme ou, si l’on veut,  une expression de la haine contre la culture qui trouve actuellement des expressions inédites dans le monde d’Internet, du management et du transhumanisme. Voilà qui conduit à la négation des cultures, qui ne peuvent vivre que dans un certain degré de séparation avec d’autres cultures, dans une certaine unité interne assurée par des frontières, l’éloignement, les identités singulières.

    Dévoyer un grand et juste combat à des fins politiciennes est plus que méprisable, c’est dangereux. la négation de la condition humaine, qui est toujours enracinée dans un milieu, dans un contexte, dans une mémoire, fait l’impasse sur la question du moment : Comment faire société entre nous ? La Nation répondait : quelques soient leur origine, leur foi, et leurs idées, la France unit tous ceux qui la préfèrent. Le couvercle de la nation tenait ensemble ce que tout le reste séparait. La réponse disparaît, avec cette grande séparation qui nous dépouille de ce qui fait de nous des Français, les hommes de cette terre et des nôtres, pour en finir avec toute résistance au nouvel ordre mondial, du droit, du contrat et du marché.

    Et nous en sommes là, à la montée d’une police des idées, des mots et de la pensée, qui pourrait bien réussir ce prodige paradoxal : faire de la race ce qu’était le sexe au XIXème siècle, ce à quoi il est tellement interdit de penser et de dire qu’on y pense toujours et qu’on ne voit plus qu’elle. L’inflation de l’antiracisme produisant le racisme ? Prodige assez banal des politiques médiocres qui pensent changer le réel par décret et se garder des choses en supprimant les mots.

    Hervé Juvin (Le Figaro, 17 avril 2015)

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  • « Si tout le monde peut être français, le communautarisme est inévitable »...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien avec Jean-Yves Le Gallou, cueilli sur le site de Polémia et consacré au débat autour de la notion de « Français de souche »...

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    « Si tout le monde peut être français, le communautarisme est inévitable »

    Le mot « Français » est souvent complété d’une appartenance communautaire… Que veut-il dire ?

    Il existe deux sens très différents au mot « Français » aujourd’hui :

    – un sens administratif, d’abord : être français, c’est avoir une carte d’identité française ;

    – un sens historique et culturel, ensuite, pour les Français de civilisation européenne et d’expression française.

    De ces deux définitions découlent une série de confusions devenues récemment caricaturales avec l’expression « djihadistes français ». Cette appellation est juridiquement vraie mais elle n’a aucun sens si l’on considère la définition culturelle et historique du mot « Français ».

    Quelle évolution du Code de la nationalité a permis un tel fossé entre différents « Français » ?

    Depuis 1803 (Ire République !), la base de la nationalité est la filiation et, donc, le droit du sang : un expatrié a, par exemple, des enfants français.

    Mais cette règle a été progressivement déviée par l’ajout d’éléments de droit du sol : un enfant né en France de parents étrangers peut devenir automatiquement français entre 13 et 18 ans, et un enfant né en France de parents eux-mêmes nés en France est automatiquement français… S’ajoutent à cela des naturalisations de masse sans sélection. Résultat : on fabrique chaque année autour de 150.000 « Français » dont beaucoup ne sont absolument pas assimilés.

    Il y avait eu un grand débat en 1986 autour de la suppression de ces éléments de droit du sol. Le slogan du FN était : « Etre français, cela s’hérite ou se mérite », mais ce point de vue était aussi défendu par le RPR et l’UDF ! Malheureusement, cette même année, de nombreuses manifestations étaient organisées contre la loi Devaquet qui voulait réformer l’Université et, à cette occasion, un jeune manifestant d’origine immigrée, Malik Oussekine, était mort… Victime d’une campagne de sidération médiatique, le gouvernement Chirac avait alors abandonné sa loi sur l’Université et la réforme de la nationalité.

    Il créait à la place la Commission de la nationalité qui a théorisé la conception « citoyenne » de la nationalité contre la volonté du peuple qui avait soutenu à 55% des partis opposés à celle-ci.

    Comment en est-on arrivé à parler de « Français de souche » ?

    En 1987, la conception de la nationalité française dite « citoyenne » est donc adoptée.

    En clair, tout le monde peut être français s’il réside en France et adhère à un minimum de « valeurs » républicaines (ce qui n’est même pas vérifié ni réellement défini) : une coquille vide, conception très abstraite, cache-sexe d’une communautarisation du pays. On s’est mis alors à parler de Français juifs, de Français noirs, de Français musulmans… Et le Français « moins », c’est-à-dire le Français tout court, s’est alors retrouvé dans l’expression de « Français de souche », résultat d’une conscientisation qui a débuté dans les années 2000 grâce au site François Desouche.

    Le Français de souche, c’est un Français blanc, de civilisation européenne et de religion ou d’héritage chrétien.

    Le problème, c’est que les Français « plus » sont particulièrement protégés : interdiction de les « stigmatiser », et des associations soi-disant représentatives (CRIF, CRAN, CFCM) font valoir leurs exigences. A partir du moment où l’on refuse toute spécificité d’origine, de culture, d’histoire, de civilisation au concept de Français, il ne reste plus rien et les revendications identitaires de toutes sortes divisent la France. Parler de « vivre ensemble » dans cette situation est totalement hors-sol : il n’existe nulle part, ni dans les habitudes alimentaires, ni dans le choix du lieu de vie, de l’établissement scolaire ou des références culturelles. Il est le cache-sexe d’une société éclatée puisqu’il ne peut y avoir de communauté nationale sans communauté de civilisation. Le problème n’est pas nouveau, Aristote le disait déjà !

    Qui pourrait représenter les Français de souche ?

    Pour les Français de souche, le vote FN est la voie politique la plus évidente pour exprimer leur « cri de douleur ». Mais les dirigeants du FN entendent, eux, s’adresser aux « Français de toutes origines » – ce qui peut se comprendre – et ne sont pas loin d’adhérer à la conception citoyenne de la nationalité…

    Il y a, là encore, un fossé qui se creuse : les deux principaux dirigeants rejoignent cette conception citoyenne de la nationalité alors que les militants, les adhérents et une très grande partie des cadres et des élus défendent une conception civilisationnelle de la nationalité. Les Français de souche sont encore en grande majorité, mais ils sont les véritables orphelins de la République.

    On ne parle plus que de « République ». Où est passée la France ?

    Le mot « République » est effectivement devenu un mot-valise pour désigner tout ce qui est politiquement correct : il a remplacé les mots « nation » et « identité ».

    On ne parle plus de France mais de République. Rappelons-nous pourtant que si la Guerre de 1914 a été conduite par des « nationaux républicains » (Poincaré, Clemenceau, les généraux), les soldats, eux, sont morts pour la France ! On meurt pour quelque chose de charnel, pas pour une idée abstraite.

    Quelles solutions ?

    Même si l’expression « Français de souche » est sortie de la bouche du président Hollande dans un contexte ultra-stigmatisant puisqu’il s’agissait de qualifier le profanateur du cimetière juif de Sarre-Union (qui, par ailleurs, est d’extrême gauche), il s’est imposé quand même. C’est une première victoire sémantique pour tous ceux qui développent une volonté de réappropriation de leur identité.

    Ce combat trouve désormais un relai intellectuel chez Zemmour, Juvin, Finkielkraut, Camus, Millet mais également dans LMPT, les Veilleurs ou les propos de Béatrice Bourges.

    Ces discours permettent une conscientisation des origines de la France. Il y a donc une demande populaire et une expression intellectuelle : les Français de souche sont encore très largement majoritaires ; l’enjeu est donc désormais de tenter un renversement politique malgré la dictature médiatique.

    Il faut enfin s’affranchir de la culpabilisation imposée dans la sphère publique : ce système communautaire qui détruit la France ne tient plus que grâce à une propagande intense qu’il faut contrer. Et à laquelle, surtout, il ne faut pas céder !

     Jean-Yves Le Gallou, propos recueillis par Charlotte d'Ornellas (Polémia, 2 mars 2015)

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