Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

dominique venner - Page 24

  • Ce que valent les civilisations...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Dominique Venner, cueilli sur son site et qui prend pour point de départ la polémique sur les civilisations déclenchée par la "petite phrase" de Claude Guéant... 

    Delphes.jpg

     

    Ce que valent les civilisations...

    Ce fut un beau vacarme ! Dans le vif de la campagne présidentielle, le ministre de l’Intérieur avait lâché une petite phrase destinés à faire grimper les sondages dans une opinion excédée par la présence islamique : « Les civilisations ne se valent pas… » La puissante coterie « culturelle » prit feu comme on l’attendait. Manquait cependant au chœur des indignés un très grand intellectuel, George Steiner, auteur récent d’une page admirative sur la Grèce antique : « L’incandescence de la créativité intellectuelle et poétique en Grèce […] aux Ve et VIe siècles avant notre ère, écrit-il, demeure unique dans l’histoire humaine. À certains égards, la vie de l’esprit n’a été ensuite qu’une copieuse note en bas de page. […] Le “politiquement correct” pénitentiel qui prévaut aujourd’hui et le remord du post-colonialisme aidant, il est délicat ne serait-ce que de poser les questions sans doute pertinentes, de demander pourquoi l’ardente merveille qu’est la pensée pure ne l’a emporté presque nulle part ailleurs (quel théorème nous est venu d’Afrique ?) (1) »

    De cette créativité exceptionnelle, les Européens ont hérité. Et cet héritage fut le socle de leur civilisation aujourd’hui fortement ébranlée, mais toujours apte à renaître comme plusieurs fois déjà au cours d’un très long passé. Cette espérance me venait à l’esprit en lisant l’ouvrage que vient de publier Paul-François Paoli, Pour en finir avec l’idéologie antiraciste (2). Chroniqueur au Figaro littéraire et auteur de plusieurs essais, Paoli cite d’ailleurs aussi l’extrait du livre de George Steiner auquel je viens de faire allusion.

    Dans le très complet et intelligent décryptage qu’il fait de l’idéologie antiraciste, Paul-François Paoli est en bonne compagnie, apportant une contribution originale aux réflexions développées par Alain Finkielkraut, Renaud Camus, Richard Millet et autres téméraires bretteurs. Il développe une analyse assez remarquable et très complète des causes intellectuelles et historiques qui ont fait de la France, au fil des siècles, la nation européenne la plus déracinée avant de devenir la terre d’élection de l’universalisme puis de l’antiracisme : « Fille aînée de l’Église, puis fille autoproclamée de la Raison avec Descartes, enfin pays des Lumières et de la grande Révolution, à chaque fois nous superposons au peuple français un principe qui en serait l’âme et l’emblème. C’est le fameux discours sur les “valeurs universelles” ». Les Français sont sans doute les seuls au monde avec les Américains à croire qu’un pays et un principe peuvent se confondre. S’ils le croient c’est que ce leur fut enseigné et répété sur tous les tons de génération en génération au point de s’inscrire dans leurs « représentations ».  Or, constate Paoli, à la suite de la décolonisation, on a vu se décomposer le grand récit que les Français avaient raconté au monde depuis quelques siècles. Le pays de Descartes et de la Raison, berceau des Lumières, s’imaginait vouée à être la nation exportatrice des idéaux universalistes de liberté, d’égalité et de fraternité. Ce grand récit, souligne Paoli, a atteint son apogée durant l’Exposition coloniale de 1931. Affreusement affaiblie par le bain de sang de 14-18, l’ex Grande Nation s’est mirée une dernière fois au spectacle de ses colonies. L’effondrement de 1940, la défaite de Diên Biên Phu et la perte de l’Algérie ont scellé la fin de cette illusion. Et pourtant, « nous continuons d’imaginer que nous avons un “message” à délivrer à l’humanité, de Mayotte à l’Afghanistan en passant par la Lybie… » Nous n’avons pas compris que le projet utopique d’unification de l’humanité issu du message chrétien et de la Révolution française, n’intéressait plus personne, pas plus les Chinois que les Musulmans. Après la fin de la guerre d’Algérie, ce qui subsistait de ces idéaux a servi de terreau à l’idéologie antiraciste, instrument du « grand remplacement » décrit par Renaud Camus. Avec un rare courage, Michèle Tribalat, directrice de recherche à l’Institut national d’études démographiques (INED) a décrit de l’intérieur la logique du système : « La réalité, la mise en évidence des faits ne comptent guère. […] Travailler sur l’immigration, c’est partir en mission contre ceux qui pensent mal. […] L’antiracisme idéologique structure l’expression savante et ordinaire sur l’immigration (3) ». Il en était ainsi dans le système soviétique avant son effondrement soudain. La réalité du socialisme ne pouvait être ce que chacun pouvait observer. La perception des victimes était fausse et réactionnaire. On sait ce qu’il est finalement advenu de ce tripotage après 1989.

    Dominique Venner

    (www.dominiquevenner.fr, 28 février 2012)


    Notes

    1. George Steiner, La Poésie de la pensée, Gallimard, 2011.
    2. Paul-François Paoli, Pour en finir avec l’idéologie antiraciste, François Bourin Editeur, 180 p., 20 €.
    3. Michèle Tribalat, Les Yeux grands fermés, l’immigration en France, Denoël, 2010.
    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Crimes d'état et scandales politiques...

    La Nouvelle Revue d'Histoire est en kiosque (n°59, mars - avril 2012).

    Le dossier central est consacré aux crimes d'état et aux scandales politiques. On peut y lire, notamment,  des articles de  Yann Le Bohec ("César et les ides de mars"), de Jean-Joël Brégeon ("Le duc d'Enghien, victime de Bonaparte"), de Jean-Marie Constant ("Le duc de Guise. Par ordre du roi") de Dominique Venner ("Pucheu. Alger 1944. La première épuration") et de Charles Vaugeois ("La double mort de John-F. Kennedy").

    Hors dossier, on pourra lire, en particulier, un entretien avec Dominique Venner et des articles de Jean Monneret ("Evian 1962. Les Européens massacrés"), d'Aymeric Chauprade ("Friedrich Ratzel, naissance de la géopolitique"),  et de Thierry Buron ("Le livre-testament d'Ernst Nolte").

    NRH 59.jpg

     

    Lien permanent Catégories : Revues et journaux 0 commentaire Pin it!
  • Les esclaves heureux de la liberté...

    Les éditions David Reinharc viennent de publier un essai décapant du philosophe et journaliste espagnol Javier Ruiz Portella, intitulé Les esclaves heureux de la liberté - Traité contemporain de dissidence. Pour Dominique Venner, il s'agit d'"un formidable et réjouissant instrument de nettoyage des méninges et des idées reçues", d'"une petite bombe atomique philosophique"... L'ouvrage est préfacé par Bruno de Cessole.

    Esclaves heureux.jpg

    "Sous le titre Les esclaves heureux de la liberté. Traité contemporain de dissidence, un essayiste espagnol parfaitement francophone publie un formidable et réjouissant instrument de nettoyage des méninges et des idées reçues. Son livre a d’abord été publié en Espagne à la veille de l’été aux Editions Altera (Madrid). Il s’agit d’une véritable "bombe atomique philosophique" comme l’a remarqué la Nouvelle Revue d’Histoire dans sa parution de septembre/octobre 2011, en annonçant la parution du livre. Philosophie sans le jargon des philosophes mais avec de multiples emprunts à l’histoire. C’est un essai qui prouve, entre autres, le pouvoir régénérateur de la pensée et de la mémoire historiques. Aucun disciple de Nietzsche n’avait écrit quelque chose d’aussi fort, avec tant de poésie, d’humour et de vigueur renversante. Pourquoi la beauté et la vigueur ont-elles déserté notre monde ? Pourquoi les hommes libres de la modernité sont-ils les plus esclaves de tous ? Comment échapper à cette fatalité ? L’ironie et l’humour affleurent déjà dans le titre, dans lequel il est question d’esclaves... heureux du fait même de leur liberté ! Qui sont-ils ? Ce sont nos contemporains. Ce sont les hommes et les femmes plongés dans le plus cruel des paradoxes : celui qui marque les êtres les plus libres de toute l’histoire... mais aussi, de fait, les plus soumis aux objets, aux produits et à la consommation. Autrement dit : soumis au pouvoir de l’argent et à la mainmise du matérialisme. Tel est le paradoxe de nos temps : l’homme moderne connaît une heureuse prospérité, eu égard à l’histoire de l’humanité... mais il est misérable, dès lors qu’on porte son regard sur le sens qu’il donne à sa vie et au sort qu’il réserve à la beauté du monde. C’est bien une critique acérée de notre temps qu’entreprend ce Traité contemporain de dissidence, sorte de manuel du "politiquement incorrect"."

    Lien permanent Catégories : Livres 0 commentaire Pin it!
  • Treize meurtres exemplaires...

    Les éditions Pierre Guillaume de Roux viennent de publier L'imprévu dans l'histoire, un ouvrage de Dominique Venner consacré à treize assassinats politiques qui illustrent le surgissement de l'imprévu dans l'histoire. Ce livre est une version enrichie et modifiée de l'ouvrage Treize meurtres exemplaires, paru en 1988 chez Plon et qui était devenu introuvable.

     

    Imprévu dans l'histoire.jpg

    "Parmi mes travaux sur le XXe siècle, j’ai eu l’occasion de relater plusieurs de ces épisodes. Il est vrai qu’au XXe siècle on a l’embarras du choix. Et les événements soudains que je décris continuent souvent de peser sur l’époque actuelle. Je les reprends ici sous une forme neuve. Et surtout, je les replace dans une réflexion qui s’est peu à peu imposée à moi : l’histoire nous surprend toujours. Elle est largement soumise à l’imprévu. Je me suis intéressé aussi à la diversité de leurs conséquences. Elles ont été apocalyptiques dans le cas de Sarajevo (1914), mais au contraire inexistantes à court terme pour l’assassinat du président Kennedy. Mais, dans ce cas précis, que de questions toujours non résolues – et donc captivantes – sur le ou les véritables assassins, ainsi que sur leurs mobiles ! Mais aussi, que de questions sur la nature réelle de « la plus grande démocratie » du monde, ses relations avec l’argent, le rôle des lobbies, les basses ambitions, et le système à créer des légendes et des stars ! J’ai retenu par ailleurs l’assassinat de Trotski par les sbires de Staline, au Mexique en 1940, en raison de la personnalité de la victime. Par surcroit, il s’agi d’un fascinant roman d’espionnage. Cette histoire permet aussi un plongeon dans le sombre univers de mensonges et secrets qui fut celui du communisme triomphant. Je me suis bien entendu intéressé à l’enjeu politique et historique souvent ignoré de certains meurtres, comme celui de Pierre Stolypine, premier ministre de Nicolas II, en 1911. D’autres, comme celui d’Alexandre Ier de Yougoslavie, en visite officielle à Marseille, en 1934, anticipe sur ce que sera plus tard le terrorisme au Moyen-Orient dans le prolongement du drame palestinien. Si on ne le savait pas, on découvre par plusieurs exemples à quel point la violence peut décider de tout ou presque… À moins qu’elle ne se renverse contre ses instigateurs, comme on le voit avec l’assassinat d’Aldo Moro en 1978, qui eut pour effet de permettre l’élimination des Brigades Rouges. Je ne crois pas à l’explication de l’histoire par les complots. Cela ne signifie pas que les complots n’existent pas. Mais, comme je le montre par plusieurs exemples, il arrive aussi que l’action se retourne contre ses auteurs comme un boomerang."

     

    Lien permanent Catégories : Livres 1 commentaire Pin it!
  • L'insolence des anarchistes de droite...

    Nous reproduisons ci-dessous un article de Dominique Venner, publié dans Spectacle du Monde (décembre 2011) et consacré aux anarchistes de droite, dans lequel il évoque la figure de l'écrivain A.D.G. et celle de Jean-Patrick Manchette, qu'on peut indubitablement faire rentrer dans la sous-catégorie des anarchistes de droite de gauche !...

     

    A.D.G..jpg

    L'insolence des anarchistes de droite

    Les anarchistes de droite me semblent la contribution française la plus authentique et la plus talentueuse à une certaine rébellion insolente de l’esprit européen face à la « modernité », autrement dit l’hypocrisie bourgeoise de gauche et de droite. Leur saint patron pourrait être Barbey d’Aurévilly (Les Diaboliques), à moins que ce ne soit Molière (Tartuffe). Caractéristique dominante : en politique, ils n’appartiennent jamais à la droite modérée et honnissent les politiciens défenseurs du portefeuille et de la morale. C’est pourquoi l’on rencontre dans leur cohorte indocile des écrivains que l’on pourrait dire de gauche, comme Marcel Aymé, ou qu’il serait impossible d’étiqueter, comme Jean Anouilh. Ils ont en commun un talent railleur et un goût du panache dont témoignent Antoine Blondin (Monsieur Jadis), Roger Nimier (Le Hussard bleu), Jean Dutourd (Les Taxis de la Marne) ou Jean Cau (Croquis de mémoire). A la façon de Georges Bernanos, ils se sont souvent querellés avec leurs maîtres à penser. On les retrouve encore, hautins, farceurs et féroces, derrière la caméra de Georges Lautner (Les Tontons flingueurs ou Le Professionnel), avec les dialogues de Michel Audiard, qui est à lui seul un archétype.

    Deux parmi ces anarchistes de la plume ont dominé en leur temps le roman noir. Sous un régime d’épais conformisme, ils firent de leurs romans sombres ou rigolards les ultimes refuges de la liberté de penser. Ces deux-là ont été dans les années 1980 les pères du nouveau polar français. On les a dit enfants de Mai 68. L’un par la main gauche, l’autre par la  main droite. Passant au crible le monde hautement immoral dans lequel il leur fallait vivre, ils ont tiré à vue sur les pantins et parfois même sur leur copains.

    À quelques années de distances, tous les deux sont nés un 19 décembre. L’un s’appelait Jean-Patrick Manchette. Il avait commencé comme traducteur de polars américains. Pour l’état civil, l’autre était Alain Fournier, un nom un peu difficile à porter quand on veut faire carrière en littérature. Il choisit donc un pseudonyme qui avait le mérite de la nouveauté : ADG. Ces initiales ne voulaient strictement rien dire, mais elles étaient faciles à mémoriser.

    En 1971, sans se connaître, Manchette et son cadet ADG ont publié leur premier roman dans la Série Noire. Ce fut comme une petite révolution. D’emblée, ils venaient de donner un terrible coup de vieux à tout un pan du polar à la française. Fini les truands corses et les durs de Pigalle. Fini le code de l’honneur à la Gabin. Avec eux, le roman noir se projetait dans les tortueux méandres de la nouvelle République. L’un traitait son affaire sur le mode ténébreux, et l’autre dans un registre ironique. Impossible après eux d’écrire comme avant. On dit qu’ils avaient pris des leçons chez Chandler ou Hammett. Mais ils n’avaient surtout pas oublié de lire Céline, Michel Audiard et peut-être aussi Paul Morand. Ecriture sèche, efficace comme une rafale bien expédiée. Plus riche en trouvailles et en calembours chez ADG, plus aride chez Manchette.

    Né en 1942, mort en 1996, Jean-Patrick Manchette publia en 1971 L’affaire N’Gustro directement inspirée de l’affaire Ben Barka (opposant marocain enlevé et liquidé en 1965 avec la complicité active du pouvoir et des basses polices). Sa connaissance des milieux gauchistes de sa folle jeunesse accoucha d’un tableau véridique et impitoyable. Féministes freudiennes et nymphos, intellos débiles et militants paumés. Une galerie complète des laissés pour compte de Mai 68, auxquels Manchette ajoutait quelques portraits hilarants de révolutionnaires tropicaux. Le personnage le moins antipathique était le tueur, ancien de l’OAS, qui se foutait complètement des fantasmes de ses complices occasionnels. C’était un cynique plutôt fréquentable, mais il n’était pas de taille face aux grands requins qui tiraient les ficelles. Il fut donc dévoré.

    Ce premier roman, comme tous ceux qu’écrivit Manchette, était d’un pessimisme intégral. Il y démontait la mécanique du monde réel. Derrière le décor, régnaient les trois divinités de l’époque : le fric, le sexe et le pouvoir.

    Au fil de ses propres polars, ADG montra qu’il était lui aussi un auteur au parfum, appréciant les allusions historiques musclées. Tour cela dans un style bien identifiable, charpenté de calembours, écrivant « ouisquie » comme Jacques Perret, l’auteur inoubliable et provisoirement oublié de Bande à part.

    Si l’on ne devait lire d’ADG qu’un seul roman, ce serait Pour venger Pépère (Gallimard), un petit chef d’œuvre. Sous une forme ramassée, la palette adégienne y est la plus gouailleuse. Perfection en tout, scénario rond comme un œuf, ironie décapante, brin de poésie légère, irrespect pour les « valeurs » avariées d’une époque corrompue.

    L’histoire est celle d’une magnifique vengeance qui a pour cadre la Touraine, patrie de l’auteur. On y voit Maître Pascal Delcroix, jeune avocat costaud et désargenté, se lancer dans une petite guerre téméraire contre les puissants barons de la politique locale. Hormis sa belle inconscience, il a pour soutien un copain nommé « Machin », journaliste droitier d’origine russe, passablement porté sur la bouteille, et « droit comme un tirebouchon ». On s’initie au passage à la dégustation de quelques crus de Touraine, le petit blanc clair et odorant de Montlouis, ou le Turquant coulant comme velours.

    Point de départ, l’assassinat fortuit du grand-père de l’avocat. Un grand-père comme on voudrait tous en avoir, ouvrier retraité et communiste à la mode de 1870, aimant le son du clairon et plus encore la pêche au gardon. Fier et pas dégonflé avec çà, ce qui lui vaut d’être tué par des malfrats dûment protégés. A partir de là on entre dans le vif du sujet, c’est à dire dans le ventre puant d’un système faisandé, face nocturne d’un pays jadis noble et galant, dont une certaine Sophie, blonde et gracieuse jeunes fille, semble comme le dernier jardin ensoleillé. Rien de lugubre pourtant, contrairement aux romans de Manchettes. Au contraire, grâce à une insolence joyeuse et un mépris libérateur.

    Au lendemain de sa mort (1er novembre 2004), ADG fit un retour inattendu avec J’ai déjà donné, roman salué par toute la critique. Héritier de quelques siècles de gouaille gauloise, insolente et frondeuse, ADG avait planté entre-temps dans la panse d’une république peu recommandable les banderilles les plus jubilatoires de l’anarchisme de droite.

    Dominique Venner (Spectacle du monde, décembre 2011)

    Note

    Alain Fournier, dit ADG (1947-2004), un pseudonyme choisi à partir des initiales de son tout premier nom de plume, Alain Dreux-Gallou. Une oeuvre jubilatoire plein d ‘irrespect contre les “valeurs” avariées d’une époque corrompue.

    Lien permanent Catégories : Textes 0 commentaire Pin it!
  • L'histoire serait-elle impartiale ?...

    Nous reproduisons ci-dessous l'éditorial de Dominique Venner publié dans le dernier numéro de la Nouvelle Revue d'Histoire (n°58, janvier - février 2012) au manichéisme qui sévit actuellement dans la lecture de l'histoire.

     

    Dominique-Venner.jpeg

     

    L'histoire serait-elle impartiale ?

    Pour tous ceux qui avaient des raisons de combattre la Collaboration, celle-ci fut détestable.  Et de fait, ses aspects haïssables n’ont pas manqué. Pourtant, du côté français, mais aussi du côté allemand, des hommes d’honneur et de foi se sont engagés dans cette voie qu’ils croyaient juste et que l’histoire a condamné. Le plus souvent, ils ont payé leurs illusions au prix fort. Non seulement ils y ont fréquemment perdu la vie, leur liberté et leur existence sociale, mais plus encore la possibilité de faire valoir leurs raisons. Morts ou survivants, il leur fallait endurer une réprobation générale à l’égard d’un engagement réputé ignoble et devenu incompréhensible, L’interprétation imposée par la victoire de leurs adversaires triomphants était à la fois totale et totalitaire (1). En d’autres termes, l’histoire écrite par les vainqueurs impose un manichéisme absolu entre eux-mêmes qui sont associés au Bien, et les vaincus, devenus incarnation du Mal à tout jamais.

    Il en est toujours ainsi après une guerre de religions. Et la Seconde Guerre mondiale fut une guerre de religions. Les vaincus perdirent d’un seul coup la possibilité d’être compris. Ce qui les avait justifiés quand ils portaient encore les armes, soudain s’est évanoui, remplacé par le verdict sans appel d’un procès jugé d’avance, où les inquisiteurs triomphants jouissaient du pouvoir de les transformer en d’indicibles criminels pour l’éternité ou presque. Oui, je dis bien l’éternité !

    L’empereur Julien, qui pourtant ne fit jamais couler le sang pour la cause qu’il croyait juste, se voit aujourd’hui encore qualifié d’Apostat par la mémoire collective imposée par ses adversaires victorieux. Rien ne sert d’expliquer que cet attribut est aussi calomnieux que scandaleux. Calomnieux, puisque jamais Julien n’adopta la nouvelle religion étrangère contre laquelle il éleva la protestation de sa fidélité. Il ne fut donc pas « apostat », mais fidèle. Si l’on réfléchit un instant, l’attribut dont on continue de l’affubler est également scandaleux. Dans notre monde européen, libre en principe de tout interdit religieux, l’apostasie est en effet une sentence criminelle d’un autre âge, impliquant une condamnation pour l’éternité. En dépit du temps écoulé et des travaux de réhabilitation des historiens, elle a cependant persisté (2).

    Par ce détour, je ne me suis pas éloigné de ma réflexion initiale. L’exemple de l’opprobre attachée au nom de l’empereur Julien, disparu depuis plus de quinze siècles, attire l’attention sur l’écriture de l’histoire après un conflit ayant mobilisé les passions à l’extrême et dont les vainqueurs ont l’exclusivité de la parole publique. Ce que j’ai dit de l’empereur Julien pourrait l’être aussi, bien que de façon plus limitée, pour le grand personnage que fut le Connétable de Bourbon, à tout jamais qualifié de « traître » par une mémoire française qui se confond avec celle de l’État. En son temps, la révolte du Connétable contre François Ier et sa mère qui l’avaient grugé, fut comprise par les contemporains. Le droit féodal et le principe de l’engagement réciproque la justifiaient. Rien de cela ne fut plus admis quand s’imposa plus tard l’idée nouvelle de la nation et de la « trahison » postérieure à 1792 ou 1870.

    Nous voici revenus au jugement manichéen que l’histoire inflige aux acteurs des années de l’Occupation. Par deux autres exemples, j’ai montré ce qu’il y a d’incertain dans le jugement historique. Autrement dit, quand un vaincu, devant les fusils qui vont le tuer, s’écrie : « L’Histoire jugera ! », il se remonte le moral au prix d’une chimère. L’histoire n’est jamais un tribunal impartial. Elle est toujours écrite par les vainqueurs. Il arrive cependant qu’une défaite ultérieure des anciens vainqueurs, une défaite « historique », c’est-à-dire sans appel, accorde une revanche inattendue aux vaincus. Il en a été ainsi en Russie pour les Blancs, réhabilité par l’effondrement absolu du système qu’avaient édifié les Rouges après 1917.

     Dominique Venner (La Nouvelle Revue d'Histoire n°, janvier-février 2012)


    Notes

    1. Totalitaire : qui s’impose à tous et en toute chose, pénétrant la vie privée au même titre que le vie publique.

    2. Grand historien récemment disparu, Lucien Jerphagnon, chrétien lui-même, s’indignait de l’éternisation de la condamnation posthume portée contre le jeune empereur auquel il consacra une captivante et riche biographie, Julien, dit l’Apostat (Tallandier, 2008).

    Lien permanent Catégories : Textes 0 commentaire Pin it!