"On s’interroge beaucoup sur l’incapacité de l’école à assurer la promotion sociale des familles modestes (notamment celles issues de l’immigration), rôle qu’elle assurait encore jusqu’au milieu du dernier siècle. Je crois que l’on tient là une partie de la réponse. L’école républicaine ne veut plus transmettre. Aux pauvres, un savoir pauvre. Ils ne méritent pas plus que cette sollicitude hypocrite qui ne leur donne rien sous prétexte de ne pas les brusquer. Détenir un savoir et le transmettre à des enfants, c’est une conception réactionnaire, ou même, allez, n’ayons pas peur des mots, une idéologie fascisante. Et c’est ainsi que, devant le naufrage de l’école publique, ceux qui ont les moyens mettent leurs enfants dans le privé."
Les éditions Balland viennent de publier C'est la culture qu'on assassine, un recueil des chroniques de Pierre Jourde, parues dans le Nouvel Observateur. On retrouve dans ces textes le talent et la verve pamphlétaire de l'auteur de La littérature sans estomac (L'Esprit des Péninsules, 2002).
"Le barbu sur l'image de la couverture, c'est la culture qu'on assassine. Mais on peut y voir aussi l'inverse : celles et ceux dont on a entrepris d'asservir l'esprit, et qui se révoltent contre l'empire de la crétinisation. Les pouvoirs économique, politique, médiatique se conjuguent pour nous plonger dans une nouvelle barbarie : abandon de l'école publique, transformation des universités en monstres bureaucratiques, télévision avilissante, ruine des instituts culturels français mépris affiché pour la littérature, journalistes usinant du cliché, promotion de faiseurs au rang de grands écrivains, mort de la culture populaire, disparition de l'esprit critique. Face à cette agression. tous les coups sont permis, notamment ceux de l'ironie. Contre les fausses valeurs et la déréalisation propagées par les médias, la littérature est une résistance".
Commentaires
Félicitations Monsieur Jourde pour cet ouvrage sur la culture!
Ayant fait votre découverte à la fête du livre, à la Ferté Vidame, je me régale de tous vos articles qui sont criants de vérité.
Comme les comédies de Molière touchent au drame, la philosophie est le fondement de vos chroniques.
pour faire rapide je me permets de citer Goethe: le gôut se forme au contact de l'excellent et non du médiocre"
Bien à vous