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  • L'avant-guerre civile...

    "Les dirigeants européens sont naturellement au fait de l'évolution démographique, ils savent que sauf renversement à première vue bien improbable de tendance (renversement qui ne saurait résulter, en tout état de cause, que d'une reprise significative de la natalité chez les Européens de souche), la population d'origine extra-européenne a toute chance de devenir à relativement brève échéance majoritaire en Europe. Théoriquement, cela pourrait conduire à une remise en cause de leur hégémonie. Mais ils n'y croient pas trop, car, estiment-ils, l'immigration n'a rien d'homogène, elle est au contraire extrêmement diversifiée. Les immigrés sont aussi différents entre eux qu'ils diffèrent tous ensemble des autochtones aujourd'hui encore majoritaires. Les dirigeants n'ont donc pas à s'inquiéter outre mesure pour leur avenir, il leur suffira, pour maintenir leur hégémonie, d'adapter leur stratégie traditionnelle aux nouvelles données de la société multiculturelle, en jouant telle ethnie contre telle autre, par exemple. D'ores et déjà, au demeurant, ils ont commencé à préparer le terrain en encourageant le développement du communautarisme, formule privilégiant l'appartenance ethnique, culturelle ou religieuse au détriment du lien civique. L'idéal n'est plus ici celui de l'assimilation, mais de la simple coexistence entre communautés hétérogènes les unes aux autres, communautés que rien n'unit plus que leur commune allégeance aux dirigeants."

    Eric Werner, L'avant-guerre civile

     

    Les éditions Xénia viennent de rééditer L'avant-guerre civile, un essai fondamental  et prémonitoire d'Eric Werner, publié initialement en 1998. Eric Werner, qui collabore fréquemment à la revue Éléments, est l'auteur de plusieurs essais importants comme L'après-démocratie (L'Age d'Homme, 2001), Douze voyants (Xénia, 2010) ou De l'extermination (Xénia, 2013) et de recueils de chroniques comme Ne vous approchez pas des fenêtres (Xénia, 2008) et Le début de la fin et autres causeries crépusculaires (Xénia, 2012).

     

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    " Enfin réédité, voici un ouvrage capital pour comprendre notre temps. L'avant-guerre civile a fait sensation lors de sa sortie en 1998. Avec des années d'avance, il décrivait les conséquences de l’effondrement de l’URSS. Une fois le grand Ennemi disparu, qu'allait faire le système de pouvoir occidental pour se légitimer? Se reconstruire un ennemi, au besoin dans sa propre basse-cour. L'après-guerre froide aurait pu être la paix. Ce fut l'avant-guerre civile. Philosophe politique, mais aussi grand érudit, critique littéraire et connaisseur de la pensée antique, Eric Werner invite toute l’expérience et la sagesse de l’Occident à se pencher sur le berceau de l’ère nouvelle que nous vivons. Il montre les continuités, ouvertes et secrètes, du Pouvoir. Il dégage aussi les situations inédites et potentiellement incontrôlables. Il consolide enfin les passerelles que nul n’osait trop évoquer entre l’ordre et son contraire, le chaos violent. Ce qui n’était que frôlements et connexions fortuites apparaît désormais comme l’architecture même du contrôle politique et social de la masse globalisée. Plus de quinze ans après sa première édition, ce livre trouve des illustrations confondantes dans l’actualité géopolitique et sociale de notre temps. Ecrit dans un style éblouissant, L’avant-guerre civile est une véritable école de pensée et d’intelligence pour les temps de troubles. "

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  • Halte à la tintinophobie !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de François-Xavier Ajavon, cueilli sur le Figarovox et consacré aux accusations de racisme qui visent périodiquement les albums de Tintin, le héros d'Hergé...

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    Halte à la tintinophobie !

    Les polémiques autour de Tintin poussent comme des champignons après la pluie, comme les champignons sur l'Étoile mystérieuse... Dernière péripétie médiatique en date autour du sulfureux reporter à la houppette blonde et au chien parlant: la charge de la communauté amérindienne de Winnipeg (capitale du Manitoba, au centre du Canada) contre la bande dessinée Tintin en Amérique qu'ils voudraient interdire à la vente dans une chaîne de librairies de la ville.

    L'album, publié initialement en 1932 puis réédité dans une version couleur modernisée en 1946, véhiculerait selon eux des stéréotypes racistes à l'égard des indiens «Peaux-rouges». L'avocate à l'origine de cette virulente charge communautaire explique: «Les indiens sont présentés comme des êtres sauvages et dangereux, des êtres que l'on doit craindre». Cette représentation des autochtones chez Tintin ferait écho, d'après elle, au racisme subi de nos jours par les amérindiens. La chaîne de librairies visée par cette opération, Chapter's, a d'abord retiré l'album présumé honteux de la vente -avant de vite le remettre en rayon... le temps de mesurer le manque à gagner d'une telle décision (c'est l'album de la série Tintin qui se vend le mieux à travers le monde...)? Ou de simplement le lire? Et de constater -à condition d'aller au-delà de la couverture (où l'on voit Tintin en mauvaise posture, ficelé à un poteau, sous la menace du tomawak d'un chef indien)- que le portrait fait par Hergé des amérindiens est plus complexe que ne veulent bien le dire ses détracteurs...

    À Chicago, aux grandes heures de la prohibition, Tintin entreprend de lutter contre la pègre en général et Al Capone en particulier (Dans le précédent opus -Tintin au Congo- le petit reporter était parvenu à démanteler un trafic de diamants organisé par le Saint-Patron de tous les gangsters). Armé de son courage, de sa carte de presse et de son chien Milou, Tintin poursuit l'aventure, se fait enlever par des bandits, est pris dans une guerre des gangs, et finit par atterrir sur les terres des Peaux-Rouges.

    Commencée à l'ombre des gratte-ciels de Chicago, l'aventure se poursuit sous la forme d'une sorte de western belge où le reporter abandonne son style vestimentaire habituel, pour un accoutrement de cow-boy -chemise à carreaux, Stetson avantageux et révolver à la ceinture- que n'aurait pas renié John Wayne. Afin de se tirer d'affaire, l'un des gangsters que pourchasse Tintin convainc les indiens que le petit reporter cherche à les dépouiller de leurs terres. S'ensuit une dizaine de pages où l'on voit le héros de Hergé aux prises avec les autochtones. Le chef déterre la hache de guerre et Tintin est capturé. Voit-on des «sauvages»? Non, mais un peuple défendant sa terre... Le méchant de l'histoire est le gangster américain qui a poussé Tintin dans ce traquenard. À l'issue de la péripétie du pétrole est découvert sur la réserve des Peaux-rouges. Des nuées d'hommes d'affaires cherchent à acheter les terres. L'un de ces vautours offre 25$ au chef, qui refuse, puis toute la tribu est délogée manu militari. On voit une ville entière se construire sur les terres pétrolifères indiennes, en une nuit seulement... On voit par là non seulement qu'Hergé n'a pas méprisé les indiens, mais qu'il attribuait plutôt le mauvais rôle aux colonisateurs avides de richesses.

    Ce n'est pas la première fois que Tintin est la cible des militants besogneux du politiquement correct et des censeurs hyperactifs des causes communautaires... L'album Tintin au Congo est régulièrement la cible de procès, de déclarations indignées sur le racisme supposé d'Hergé, et de happenings tragi-comiques dans les librairies. A la fin de l'année 2014 un angoissant «Groupe d'intervention contre le racisme» a organisé une opération coup de poing contre l'aventure congolaise de Tintin: des membres de ce groupuscule sont entrés en force à la Fnac des Halles à Paris pour coller sur les albums d'Hergé le sticker de la honte: «Produit toxique, relents racistes. Peut nuire à la santé mentale»…

    Afin de faciliter la tâche de la police de la Bande-dessinée (qu'il faudra bien finir par créer...) nous suggérons plusieurs actions afin de rendre les albums de Tintin parfaitement conforme à l'hygiène mentale et morale de notre temps:

    - commencer par faire disparaître totalement le personnage du Capitaine Haddock, qui est une honteuse caricature de marin alcoolique. Le syndicat des officiers de marine alcolo-dépendants ne saurait tolérer plus longtemps cette situation.

    - il sera nécessaire de revoir intégralement le personnage de la Castafiore, qui pourrait incommoder par son caractère et ses traits bien des chanteuses lyriques en surpoids.

    - comment tolérer plus longtemps le personnage de petit démon d'Abdallah, qui tyrannise littéralement Tintin dans plusieurs épisodes? Cette représentation des mineurs issus des pays orientaux pourrait tomber sous le coup de poursuites.

    - il faudra aussi penser à ménager le peuple imaginaire de Syldavie, on ne sait jamais... certains syldaves imaginaires pourraient déposer plainte.

    - et que penser de la représentation de la gémellité à travers le tandem bouffon des Dupont-d?! Une commission consultative de jumeaux devra rendre un rapport sur la question. Des États-généraux s'ensuivront. Puis un Grenelle.

    - et les sourds, ne pourraient-ils pas se sentir blessés par le professeur Tryphon Tournesol, son cornet auditif et le génie qu'il a d'être toujours à côté de la plaque?

    Quand tous les albums seront épurés, nous pourrons à nouveau les rééditer. Ils seront conformes au temps, et ne blesseront personne.

    Toutes les pages seront blanches...

    François-Xavier Ajavon (Figarovox, 18 mars 2015)

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