"Je viens d'une terre ferme, toute ridée d'histoire, d'une Europe fatiguée d'avoir été longtemps sur la brèche, qui pense aux vacances et rêve d'une société de soins. Ses officiels ont à coeur d'effacer ses frontières linguistiques sous une langue unique, le globish, qui n'a d'anglais que le nom. Notre Euroland - capitale : Bruxelles - a officiellement répudié l'ancien " concert des nations ", d'où naissent curieusement toutes sortes de couacs et fausses notes. Il s'étonne que le Grec n'y ressemble pas au Suédois, le Lituanien à l'Italien, ce que chaque crise lui rappelle à son corps défendant."
Une fois de plus , Régis Debray navigue à contre-courant avec cet Eloge des frontières publié ces jours-ci aux éditions Gallimard. A lire !
"En France, tout ce qui pèse et qui compte se veut et se dit « sans frontières ».
Et si le sansfrontiérisme était un leurre, une fuite, une lâcheté ? Partout sur la mappemonde, et contre toute attente, se creusent ou renaissent de nouvelles et d’anciennes frontières. Telle est la réalité. En bon Européen, je choisis de célébrer ce que d’autres déplorent : la frontière comme vaccin contre l’épidémie des murs, remède à l’indifférence et sauvegarde du vivant. D’où ce Manifeste à rebrousse-poil, qui étonne et détone, mais qui, déchiffrant notre passé, ose faire face à l’avenir."