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  • Vos valeurs républicaines ont le teint pâle ? Suivez une Hugothérapie !...

    Les éditions Via Romana viennent de rééditer Hugothérapie, un recueil de citations de Victor Hugo, établi par Pierre-Antoine Cousteau et préfacé par Jacques Perret. Journaliste "maudit", frère du fameux commandant Cousteau, Pierre-Antoine Cousteau était aussi l'ami de Lucien Rebatet. Les conversations décapantes des deux compères à la prison de Clairvaux, où ils étaient incarcérés à la suite de leur condamnation en 1946, ont été publiées après leur mort dans Dialogues de "vaincus - Lucien Rebatet/Pierre-Antoine Cousteau (Berg International, 1999). Admirateur inconditionnel de l’œuvre de Proust, Pierre-Antoine Cousteau a également établi un Proust digest, qui a été réédité en 2013 par Via Romana.

     

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    « Sans aller plus avant dans l’itinéraire de ses convictions, nous voyons assez comment le Poète a pu servir de guérisseur et de guide à un homme dénué de maturité politique et rebelle au sens de l’histoire tel que l’était Cousteau. Aussi écoutez la profession de gratitude qui termine l’avant-propos : « Si ce petit recueil contribue, si peu que ce soit, à consolider en France la République et la Démocratie, je n’aurai pas perdu mon temps. »
       « Suivent alors les citations, classées, étiquetées selon la progression thérapeutique mise au point par l’auteur. De ce florilège hugolien sélectionné dans la grande paix des prisons, vous composerez des philtres souverains qui rééduqueront pour toujours vos tripes républicaines corrompues par l’excès du bon sens et l’abus du raisonnement. Et même si le lecteur n’est pas à guérir d’une affection politique, mais simplement tourmenté par cette irritante question de savoir si, oui ou non, le monstre génial était un imbécile comme le prétendent certains connaisseurs, ils trouveront dans ce digest de quoi se faire une opinion personnelle étayée sur des citations choisies avec une objectivité aussi édifiante que récréative. Enfin, les gens pressés qui n’aiment pas la discussion pourront toujours s’en tenir au jugement que le poète exprima sur lui-même dans cet alexandrin limpide : « Oui, vous avez raison, je suis un imbécile ! »
       « Ce cri émouvant a été lâché dans les Quatre vents de l’Esprit. On pourrait y voir une espèce de boutade grandiose, une manière de modestie gigantesque, mais Cousteau lui fait rendre le son pathétique d’un aveu spontané. »

    Jacques Perret

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  • Une société de narcissiques immatures...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré à notre société qui voit le politique s'effacer au profit de l’émotionnel, du compassionnel ou du thérapeutique ...

     

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    « Le contrôle hygiéniste est le début du contrôle social »

    « Bouffe tes cinq fruits et légumes par jour », « Fais du sport », « Arrête de fumer », « Bois un verre mais pas deux », « Mets ta ceinture au volant », « Ne mange pas trop gras », « Fais du tri sélectif »… Après « Big Brother », « Big Mother » ?

     

    À partir du XIXe siècle, l’État-providence s’est progressivement mis en place pour suppléer à la disparition des solidarités organiques et communautaires dissoutes par la montée de l’idéologie individualiste. Il se transforme aujourd’hui en « État thérapeutique », pour reprendre une expression utilisée notamment par Christopher Lasch. Cet État thérapeutique se définit comme une alliance malsaine de la médecine et de l’État qui permet toutes sortes d’entraves injustifiées à la liberté. L’autorité se fait de plus en plus maternante, mais à la façon d’une mère possessive, désireuse de maintenir ses sujets dans la dépendance. La relation unilatérale avec l’État remplace les anciens liens sociaux. Le contrôle hygiéniste est le début du contrôle social. La médecine devient elle-même totalitaire quand elle participe du contrôle des populations.

     

    Le type humain dominant est aujourd’hui celui du narcissique immature, pour qui il n’existe d’autre réalité que lui-même et qui veut avant tout satisfaire ses pulsions. Ce type infantile, d’orientation tout naturellement libérale-libertaire, consonne parfaitement avec un système qui, comme le disait Marx, a tout noyé « dans les eaux glacées du calcul égoïste ». Il en découle une civilisation thérapeutique centrée sur le moi. Pierre Manent dit très justement que le libéralisme est d’abord un renoncement à penser la vie humaine selon son bien ou selon sa fin.

     

    Dans une société où règne l’industrie du divertissement, où personne ne s’interroge plus sur le sens de sa présence au monde, le soin de soi devient l’alpha et l’oméga de la raison d’être. Il ne s’agit plus seulement d’être en bonne santé, mais d’être « bien dans sa peau » pour oublier sa finitude. En attendant l’immortalité en ce bas monde, un rêve de jeunesse éternelle domine chez des individus qui, n’étant jamais devenus adultes, conçoivent la vie comme une fusion maternelle à laquelle aucun ordre symbolique n’a mis fin, et vivent dans une culture de l’instant ayant évacué tout sens de la continuité historique. La société s’organise alors selon le principe de la rivalité mimétique, d’une rivalités d’egos – en termes freudiens, des Moi débarrassés à la fois du Ça et du Surmoi -, tous persuadés d’être au centre du monde, ce qui ne peut que favoriser la lutte de tous contre tous.

     

    Plus profondément, qu’est-ce que cela veut dire ?

     

    La tendance est à la « psychologisation » des problèmes politiques et sociaux. La montée de l’insécurité devient un « problème de société », le chômage un « malheur individuel », l’immigration de masse un « drame humain » (auquel le « vivre ensemble » remédiera). On escamote ainsi le caractère éminemment politique des problèmes et les responsabilités qui vont avec. Il n’y a plus d’exploités, mais seulement des « malheureux », des « victimes », des « plus démunis », etc., qui n’expriment que des « plaintes contre inconnu ».

     

    Plutôt que de mettre en lumière les modes d’aliénation propres au système dominant, on fait appel à des « cellules de soutien psychologique » chargées de remédier au « mal-être ». La montée de l’émotionnel et de l’idéologie de la compassion va de pair avec la glorification libérale de la sphère privée. La diffusion des modes de pensée thérapeutique marginalise la famille et l’école tout en laissant intact le processus de domination. La propagande de la marchandise n’émancipe des anciennes formes d’autorité que pour mieux assujettir au conditionnement publicitaire. Le sociétal remplace ainsi le social, le libéralisme culturel permettant de mieux faire passer les dégâts causés par le libéralisme économique.

     

    Tout désir matériel ou affectif est immédiatement transformé en « droit ». Dans le système capitaliste, la volonté de suraccumulation se nourrit de cette illimitation du désir. L’extension de la logique marchande implique donc la destruction de tout ce qui peut ralentir le désir d’avoir et inciter au désintéressement. Comme l’écrit Jean Vioulac : « L’avènement de la société de consommation impose la dissolution de tout ce qui serait susceptible de freiner l’achat de marchandises, et donc l’abolition de toute loi morale réprimant la satisfaction immédiate du désir. Le libéralisme, en tant qu’il se définit par l’exigence de la dérégulation et de la désinstitutionnalisation de toutes les activités humaines, est le projet politique de démantèlement complet de l’ordre de la loi, et en cela un des plus puissants moteurs du nihilisme. »

     

    Au fil des années, on a voulu nous coller la trouille avec le péril bolchevik, la menace lepéniste, le raz-de-marée islamiste et, désormais, le terrorisme et le réchauffement climatique. Et vous, Alain de Benoist, de quoi avez-vous peur ?

     

    Vous vous souvenez sans doute de ce qu’écrit Beaumarchais dans Le Barbier de Séville : « Quand on cède à la peur du mal, on ressent déjà le mal de la peur. » La peur étant mauvaise conseillère, je crois qu’il faut surtout avoir peur des peurs des autres. Personnellement, je n’ai cessé de souffrir de la bêtise de la droite et du sectarisme de la gauche. Selon les jours, c’est l’une ou l’autre qui m’inquiète le plus. Mais je n’aime pas non plus les « petites brutes » dont parlait Bernanos. Ceux qui se flattent de ne jamais rien donner aux mendiants, et qui ne se font qu’une idée haineuse de la politique. La sensibilité est à la fois le contraire de la dureté de cœur et de la sensiblerie.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 28 mai 2015)

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